Le dépistage du cancer du poumon par scanner hélicoïdal 

Le dépistage du cancer du poumon par scanner hélicoïdal 

Dans le monde, on compte 900 000 nouveaux cas par an de cancer du poumon chez l'homme et 330 000 chez la femme. En 2005 et en France, 30 651 nouveaux cas de cancers du poumon qui ont été diagnostiqués (dont 78 % chez l'homme) ont été à l'origine de 26 624 décès. La fréquence de ce cancer a été multipliée par 4 en dix ans chez les femmes de 35 à 45 ans et il fait partie des 9 cancers dont la fréquence globale a nettement augmenté de 1980 à 2005 (INCa, InVS).

Le tabac représente le principal facteur de risque du cancer du poumon, la durée du tabagisme semblant plus importante que la quantité de tabac fumée.

Le tabagisme passif majore le risque de cancer du poumon de 30 % par rapport à un entourage indemne de tabac. Il est également probable que l'usage régulier du cannabis constitue un facteur de risque (la fumée de cannabis contient quatre fois plus de goudrons que celle du tabac, davantage de cancérigènes, et son effet bronchodilatateur facilite la pénétration des toxiques).

Certains cancers du poumon sont liés à l'exposition professionnelle à des cancérigènes : amiante, goudrons, arsenic…

l est vraisemblable que des facteurs génétiques jouent un rôle dans l’apparition du cancer du poumon, ce qui pourrait expliquer que des fumeurs ne soient jamais atteints ou que des non-fumeurs le soient. On observe un nombre croissant de cancers du poumon chez des personnes - essentiellement des femmes - n’ayant jamais fumé, sans connaître les causes de ce phénomène.

Il n'existe pas de test de dépistage du cancer du poumon. La survenue d'un ou de plusieurs de ces signes doit amener à consulter son médecin : toux persistante, modification de la voix, enrouement, crachat de sang, essoufflement, altération de l'état général, ganglion à la base du cou ou au niveau des clavicules, difficulté à avaler, perte d'appétit, amaigrissement, douleurs thoraciques…

La radiographie du thorax est l'examen diagnostique de base, les examens complémentaires étant le scanner, la fibroscopie bronchique, la tomographie par émission de positon (PET Scan), la ponction ou biopsie transpariétale sous scanner, la biopsie chirurgicale de la lésion pulmonaire ou des ganglions médiastinaux (médiastinoscopie). Le bilan d'extension nécessite un scanner abdominal (ou une échographie hépatique et surrénalienne), une IRM ou un scanner cérébral, une scintigraphie en cas de douleurs osseuses.

Technique d’examen tomodensitometrique ou TDM :

Le scanner est aussi nommé tomodensitométrie, abrégé en TDM. C'est une technique d'examen qui permet de réaliser une succession de photographies du poumon en coupes horizontales, de moins de 1 mm à 6 millimètres d'épaisseur à l'aide d'un appareil à rayons X. Ces photographies permettent dans la plupart des cas de localiser la ou les éventuelles anomalie.

Les scanners classiques à rotation séquentielle ont été longtemps utilisés pour l’exploration du corps humain.

Avec les progrès technologiques et les recherches effectuées dans le domaine de l’informatique, de l’imagerie et de l’électronique, l’ensemble des constructeurs s’oriente vers une nouvelle génération de machines de tomodensitométrie : le scanner hélicoïdal multi-barrettes, encore appelé le scanner à rotation continue. Le scanner hélicoïdal est caractérisé par la rotation continue du couple tube-détecteurs autour d’un lit d’examen, se déplaçant à vitesse constante durant l’acquisition. Le tube à rayons X réalise ainsi un déplacement en hélice, décrivant un cylindre, si l’on se place dans un repère lié à la table.

Le scanner thoracique permet de repérer la taille et la localisation des anomalies ou nodules, même de très petite taille, inférieure ou égale à 3 millimètres.
En revanche, le scaner hélicoidal ne donne aucune indication sur le type de cellules dont il s'agit. Seul un prélèvement type biopsie peut dire si l'anomalie est de nature cancéreuse ou non.

Le scanner permet également de repérer si les ganglions lymphatiques à proximité sont anormalement gros. Mais il ne permet pas de préciser s'ils ont été atteints ou non par les cellules cancéreuses.

Le scanner thoracique nécessite le plus souvent l'injection d'un produit iodé appelé produit de contraste dans une veine du bras. Ce produit a pour but de repérer plus facilement l'anomalie. Une prise de sang préalable pour vérifier le fonctionnement des reins est systématiquement prescrite dans ce cas. En cas d’allergie ou autre contre-indication, la TDM ou CT scanner peu être pratiqué sans injection de produit de contraste.

Le patient est installé dans la salle d'examen. Il reste seul mais il peut communiquer avec l'équipe médicale à tout moment grâce à un micro. Il est allongé sur un lit d'examen, le plus souvent sur le dos, les bras tendus au-dessus de la tête. Le lit d'examen se déplace doucement à l'intérieur d'un large anneau pendant que les images sont enregistrées.

Le patient ne doit surtout pas bouger, car les images seraient floues. Il doit bloquer sa respiration quand le manipulateur le lui demande. Un scanner thoracique n'est pas douloureux. Il dure entre 5 et 15 minutes.

Après l'examen, le patient retourne chez lui sans surveillance particulière. Il lui est conseillé cependant de boire de l'eau en abondance, pour éliminer le produit de contraste. Les images sont analysées et interprétées par le médecin radiologue. Les résultats sont remis au patient et transmis au médecin qui a demandé le scanner thoracique.

Le dépistage du cancer du poumon par scanner a t-il un intérêt :

Etude de l’International Early Lung Cancer Action Program – ELCAP par C. Henschke et al

Le consortium international I’ELCAP (International Early Lung Cancer Action Program) publie les résultats de la survie à 10 ans de 484 patients ayant eu un diagnostic de cancer du poumon après un dépistage systématique par scanner hélicoïdal à faible dose1 chez 31 567 personnes asymptomatiques à haut risque de cancer du poumon, principalement des fumeurs, avec une médiane de 30 paquets-années à l’entrée dans l’étude (un paquet-année correspond à la consommation d’un paquet de cigarettes par jour pendant une année.

Un patient de 50 ans fumant depuis l’âge de 20 ans un paquet par jour a ainsi fumé 30 paquets-années. Un paquet de cigarettes comptant 20 g de tabac, un paquet-année équivaut à environ 7 kg de tabac fumé.

Le dépistage par scanner hélicoidal multibarrettes a été réalisé une première fois, puis une seconde fois, 7 à 18 mois plus tard, chez 27 456 personnes de la cohorte initiale, volontaires pour s’y prêter à nouveau.

Les stades précoces représentaient 85 % des 484 cancers détectés par tomodensitométrie, soit 412 patients ayant eu une résection chirurgicale au stade I. La survie de ces derniers était de 88 % à 10 ans, avec un intervalle de confiance à 95 % (74-85), et une mortalité peropératoire de 0,5 %.

Cette survie semble encore meilleure que celle rapportée par le registre nord-américain du cancer du poumon pour les stades I (75 % à 8 ans). Alors qu’aujourd’hui, aux États-Unis, 95 % des 173 000 personnes dont le diagnostic de cancer du poumon est posé chaque année décèdent de leur cancer, les auteurs suggèrent que le dépistage par le scanner hélicoïdal multibarrette ou tomodensitométrie hélicoïdale pourrait prévenir 80 % des décès par cancer du poumon.

Ces résultats permettent-ils de justifier le dépistage systématique par scaner à hélice des personnes à haut risque de cancer du poumon ?

Les auteurs répondent affirmativement, sur deux arguments. D’une part, le taux de cancers du poumon détectés par le scanner hélicoïdal dans leur cohorte est du même ordre que celui de cancers du sein par la mammographie. D’autre part, l’approche médico-économique indique que le rapport coût sur efficacité est comparable dans les deux dépistages.

Le gold standard de l’évaluation des dépistages des cancers reste cependant l’essai randomisé.

L’étude de C. Henschke et al. n’est pas expérimentale, il s’agit d’une étude observationnelle. L’apport de cette vaste cohorte est néanmoins considérable, notamment dans la force de propositions et de suggestions qu’elle représente chez les personnes à très haut risque de cancer du poumon.

Il n’est cependant pas concevable de proposer aujourd’hui de recommander un tel dépistage sans attendre les résultats de plusieurs essais randomisés, de très grande taille, comme ceux qui sont en cours de réalisation aux États-Unis (NLST, National Lung Screening Trial) ou en Europe du Nord (Nelson, Nederlands Leuvens Longkanker Screenings Onderzoek).

En effet, il est impératif d’éliminer les biais inhérents aux études observationnelles portant sur le dépistage, comme le surdiagnostic et le biais d’avancée de la date du diagnostic. Le surdiagnostic, notamment lié à l’existence de risques compétitifs de décès par d’autres causes, vient du dépistage de tumeurs qui n’auraient jamais connu de manifestations cliniques. De plus certaines des tumeurs pourraient n’avoir jamais progressé et donc jamais été diagnostiquées en l’absence de dépistage.

Il faut aussi pouvoir mesurer sans biais, dans le cadre d’essais randomisés, les bénéfices, mais aussi les risques, associés à un tel dépistage par scanner.

Un essai pilote de dépistage du cancer du poumon par le scanner hélicoïdal à faible dose (CT scan), Dépiscan (8), mené en France sur 765 patients, a permis de détecter par tomo-densitométrie un nodule pulmonaire suspect de malignité chez près de la moitié des sujets volontaires asymptomatiques à risque. La surveillance de ces nodules par TDM entre 3 et 12 mois suivant la taille, a permis le diagnostic de 8 cancers pour une prévalence de 1,45 % avec une supériorité du LDCT ou CT scanner low dose (2,4%) par rapport à la Radiographie de thorax (0,3%).

Les études américaines comme celles de la Mayo clinic (2) ou de New-York (6) montrent toutes un réel apport de la détection précoce et du dépistage par scanner helicoidal low dose pour le diagnostic de lésions pulmonaires précoces et opérables comparé aux populations témoins avec un impact variable mais toujours positif sur la survie.

Ainsi l’espoir suscité par la dernière publication de I’ELCAP renforce l’importance et l’urgence de voir se conduire plusieurs essais randomisés de grande taille et de grande qualité méthodologique sur le sujet. Ces essais doivent inclure l’évaluation à long terme du surdiagnostic et l’évaluation des coûts matériels et humains des faux positifs, en plus de l’évaluation du bénéfice en termes de survie.

Bibliographie :

  1. 1. The International Early Lung Cancer Action Program Investigators. Survival of patients with stage I lung cancer detected on CT Screening. N Engl J Med 2006 ; 355 : 1763-71;
  2. 2. Pamela M. McMahon,& al. Estimating Long-term Effectiveness of Lung Cancer Screening in the Mayo CT Screening Study. Radiology ; July 2008 248:1 278-287;
  3. 3. A. Flahault : Santé Publique, Faculté de Médecine Pierre et Marie Curie, Inserm U707, 27, rue de Chaligny, 75571 Paris Cedex 12, France;
  4. 4. Brian E. Chapman & al. Lung Cancer Screening: Simulations of Effects of Imperfect Detection on Temporal Dynamics. Radiology February 2005 234:2 582-590;
  5. 5. Stephen J. Swensen & al. Lung Cancer Screening with CT: Mayo Clinic Experience. Radiology ; March 2003 226:3 756-761;
  6. 6. New York Early Lung Cancer Action Project Investigators. CT Screening for Lung Cancer: Diagnoses Resulting from the New York Early Lung Cancer Action Project. Radiology ; April 2007 243:1 239-249;
  7. 7. David S. Gierada & al. Lung Cancer: Interobserver Agreement on Interpretation of Pulmonary Findings at Low-Dose CT Screening. Radiology ; January 2008 246:1 265-272;
  8. 8. Thierry Blanchon & al. Baseline result of the Depiscan Study : A French randomized pilot trial of lung cancer screening comparing low dose CT (LDCT) scan and chest X-ray (CXR). Lung Cancer 2007, 58 : 50-58.

Annexe

Surveillance TDM des nodules pulmonaires

Recommandations de la Fleischner society

Patient à faible risque de cancer (absence de tabagisme ou d’autre facteur de risque) :

  • ≤ 4 mm : Pas de surveillance;
  • 4-6 mm : Scanner de surveillance à 12 mois. Si pas de modification, arrêt de la surveillance. (Attention, si nodule non solide ou partiellement solide, surveillance plus prolongée);
  • 6-8 mm: scanner de surveillance entre 6 et 12 mois, puis entre 18 et 24 mois si absence de modification;
  • > 8 mm: surveillance à 3, 9 et 24 mois; TEP au FDG et/ou étude du rehaussement de la densité du nodule lors du scanner après produit de contraste et/ou biopsie.

Patient à haut risque de cancer (tabagisme ancien ou actuel ou autre facteur de risque) :

  • ≤ 4 mm : scanner de surveillance à 12 mois. Si pas de modification, arrêt de la surveillance;
  • 4-6 mm : scanner de surveillance entre 6 et 12 mois, puis entre 18 et 24 mois si absence de modification (attention, si nodule non solide ou partiellement solide, surveillance plus prolongée);
  • 6-8 mm: scanner de surveillance entre 3 et 6 mois, puis entre 9 et 12 mois puis à 24 mois si absence de modification;
  • > 8 mm: surveillance à 3, 9 et 24 mois; TEP au FDG et/ou étude du rehaussement de la densité du nodule lors du scanner après produit de contraste et/ou biopsie.

Note: pour les nodules de plus de 8-10 mm, l’American College of Chest Physicians (ACCP) ont proposé de nouvelles guidelines en 2007 basées sur la probabilité clinique de cancer :

  • Faible probabilité: TDM à 3, 6, 12 et 24 mois
  • Probabilité intermédiaire: PET-FDG, TDM avec mesure de la prise de contraste ou biopsie transthoracique ou transbronchique
  • Haute probabilité: résection chirurgicale.

Source : Guidelines for management of small pulmonary nodules detected on CT scans : a statement from the Fleischner Society - Radiology. 2005 Nov; 237(2):395-400.

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